« L’indifférentisme »

Nous voici présents pour une nouvelle rentrée paroissiale, attentifs à porter les fruits de l’Esprit et à témoigner de cette vie de Dieu en nous. L’été a été le temps du ressourcement, de la prière, et d’un renouvellement de ferveur avec la semaine de Jéricho. Néanmoins, il y a une difficulté actuelle dans une forme d’indifférence qui peut habiter nos rencontres et le relativisme apparent de la foi. Ce n’est pas nouveau, le Père saint Maximilien-Marie Kolbe en parlait déjà avant-guerre. « À notre époque, ce n’est pas sans douleur que nous voyons comme une épidémie, ce qu’on appelle l’indifférentisme, se propager de diverses manières non seulement chez les laïcs mais même dans les communautés religieuses. » 1 De plus l’attraction aliénante des moyens qui sont mis à nos dispositions pour occuper le temps, que ce soit les écrans, ou l’occupationnel du sport ou des activités ludiques, interroge sur la ferveur que nous déployons à méditer les Écritures. Dans le souffle de l’Esprit, il nous faut retrouver le zèle évangélique « La vie n’est qu’un instant, une heure passagère… Tu le sais, ô mon Dieu ! pour t’aimer sur la terre Je n’ai rien qu’aujourd’hui ! » 2 . Notre mission d’évangélisateurs, est un appel baptismal à rendre compte de notre foi dans l’instant présent, ni hier, ni demain, c’est aujourd’hui que nous devons témoigner. Un vibrant appel à partager la Bonne Nouvelle du Salut, en annonçant dans la joie la révélation du Christ Sauveur qui nous annonce que Dieu est amour. « Ils sont effectivement innombrables, les événements de la vie et les situations humaines qui offrent l’occasion d’une annonce discrète mais marquante de ce que le Seigneur [dit] dans cette circonstance » 3 Il nous faut retrouver ce zèle évangélisateur, par un
renouveau de notre ferveur et notre volonté de poser des actes qui témoignent de notre foi, rejoindre chacun dans son histoire pour l’amener au Christ et faire luire, par la grâce de l’Esprit Saint, sa dignité de fils de Dieu. Le Christ nous rend libres et nous invite à aimer en vérité, dans tous les engagements que nous prenons. L’amour est premier dans l’annonce, il nous introduit à une meilleure compréhension
de la grande espérance du Salut. De plus, l’amour enracine notre foi dans cet esprit de liberté de qualité par la recherche du meilleur bien.

1 Office des lectures – Saint Maximilien-Marie Kolbe (8 janvier 1894- 14 août 1941 Auschwitz)
2 P 645 œuvres complètes Ste Thérèse de Lisieux PN5 Mon chant d’Aujourd’hui
3 & 43 Evangelii Nuntiandi – Paul VI

Reconnaissons que nous pouvons vivre dans l’indifférence une forme de clientélisme. Nous appartenons à tel service paroissial, à tel groupe de prière, parfois très impliqués, mais nous sommes étrangers au
reste, dans une forme d’indifférence : « ce n’est pas mon boulot,… on ne peut pas être partout,…ça ne m’intéresse pas… ce n’est pas ma culture ». On aboutit à des clubs fermés, ou à des pastorales ethniques
en nous éloignant ainsi de la dimension catholique de notre foi. Entre l’attitude consumériste, et l’attitude utilitariste, nous perdons le sens de Dieu. Or, l’amour est une démarche d’aventure personnelle et communautaire, et la liberté qui en découle doit accueillir les propositions en étant présents lorsque c’est possible, ou au moins être intéressés et dans notre responsabilité répercuter la proposition lorsque
nous ne pouvons pas nous rendre disponibles. Là encore, soyons attentif à l’appel de l’Esprit car nous pouvons faire des kilomètres pour aller voir un spectacle, mais lorsqu’il s’agit de prier, prendre la voiture ou tout autre moyen de transport, cela se révèle être insurmontable. La disponibilité et l’indisponibilité doivent se vivre dans un discernement prudentiel et la volonté de vivre le dessein du Père dans ma vie à
l’écoute de la Parole de vie, et embrasé par le feu de l’Esprit et non un désir déraciné de la prière.

Nous voici alors attentifs à déployer ce zèle apostolique par une disponibilité de tous les instants à la grâce du Seigneur et au moment opportun, pour rejoindre chacun dans son histoire et relire ensemble le dessein du Seigneur pour notre aujourd’hui. « La joie de l’évangile est celle que rien et personne ne pourra jamais enlever 4 . Les maux de notre monde – et ceux de l’Église – ne devraient pas être des excuses pour réduire notre engagement et notre ferveur. » 5 L’enthousiasmante rencontre avec le Christ est une réalité que nous devons déployer dans la vie de l’Esprit Saint afin de révéler à tous l’amour de Dieu le Père et le désir intérieur de vivre la communion dans le dynamisme trinitaire pour
l’éternité. « Donne-moi ton amour, conserve-moi ta grâce, Rien que pour aujourd’hui » 6 Il nous faut retrouver la joie des premiers chrétiens à se retrouver, non pour l’ambiance ou l’utilité du moment, mais parce que le Seigneur est au milieu de nous rien que pour aujourd’hui

4 cf. Jn 16, 22
5 & 84 Evangelii Gaudium – François

La première annonce percutante de notre foi devrait peut-être viser à retrouver une communion fraternelle qui attire. Rien d’exceptionnel, mais une volonté de vivre en communauté dans une joyeuse mixité culturelle et sociale. Vivre en frères en partageant son temps, sa ferveur, et en proposant des temps de vie où Dieu est présent, rien de moins ! Faire attention à tous et à chacun dans une volonté de vivre la fraternité à travers toutes ses réalités. D’ailleurs « la proximité de Jésus à l’égard des personnes qui souffrent ne s’est pas interrompue : elle se prolonge dans le temps grâce à l’action de l’Esprit Saint dans la mission de l’Église, dans la Parole et dans les sacrements, dans les hommes de
bonne volonté, dans les activités d’assistance que les communautés promeuvent dans la charité fraternelle, en dévoilant ainsi le vrai visage de Dieu et son amour. » 7 La méditation de la Parole de Dieu nous fournit la boussole pour prendre le bon chemin et laisser la grâce de l’Esprit nous habiter. Notre responsabilité baptismale est de nous rendre disponible à la grâce et d’avancer en confiance avec le Christ dans notre barque.

Père Gregoire BELLUT -Curé – Doyen